Lucia Marta, Chargée de recherche, FRS
Le lancement de deux premiers satellites de la constellation européenne Galileo par le lanceur russe Soyouz le 21 octobre 2011 depuis la base spatiale d’Europe à Kourou (Guyane française) restera un événement mémorable dans l’histoire de la coopération internationale en matière spatiale. Le décollage a eu lieu à 12h30 (heure de Paris), et après un vol de presque 4 heures, Soyouz a déployé les deux satellites Galileo sur une orbite moyenne circulaire à une altitude de 23 222 km.
Le lancement des deux premières unités opérationnelles du programme Galileo marque un moment décisif car il représente la fin de la phase d’expérimentation et le début de la phase de validation en orbite (In Orbit Validation, IOV) d’un des deux programmes phares de l’Union européenne. La phase suivante verra le déploiement et la mise en opération de la constellation complète, qui prévoit 30 satellites en orbite et la mise en service des stations au sol. Cependant, la mise à poste de 4 satellites suffit pour rendre certains services opérationnels, même s'ils auront des performances réduites pour l’instant. C’est un pas important car l’UE se rapproche, malgré les difficultés et les retards du programme, de l’entrée en opération des services de navigation et de positionnement indépendants de – mais interopérables avec – le GPS américain et le programme russe GLONASS.
Financé à moitié par l’Union européenne et à moitié par l’Agence Spatiale Européenne, le programme civil Galileo vise à fournir un meilleur service pour les applications civiles et commerciales (en termes de disponibilité, de précision, de sécurité et de fiabilité de l’information). Néanmoins, il est désormais reconnu que la valeur stratégique de ce programme réside aussi dans ses fonctions relatives à la sécurité et à la défense.
Le lancement du 21 octobre 2011 a aussi une forte valeur symbolique pour la coopération internationale en matière spatiale. Le lanceur Soyouz sera en effet lancé pour la première fois de la base spatiale d’Europe en Guyane française (Centre Spatial Guyanais, CSG, Kourou). Avant ce jour, Soyouz, qui, depuis le lancement du premier satellite Spoutnik en 1957 a effectué avec succès plus de 1 700 lancements, avait été toujours lancé du cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan et de Plesetsk en Russie.
Suite à l’accord signé entre l’ESA et la Russie en 2005, le lanceur, de fabrication russe, complète la gamme des lanceurs européens (Ariane 5 et Vega) grâce à sa capacité de transport moyenne. Le programme « Soyouz au CSG » demande certaines adaptations portant notamment sur l’assemblage du dernier étage (étage Frégate, contenant les deux satellites) effectué en position verticale, plutôt qu’à l’horizontale, comme cela se fait habituellement en Russie ou au Kazakhstan. Ces modifications, parmi d’autres, ont été expérimentées pour la première fois pendant le vol inaugural (nommé VS01) du 21 octobre, ce qui a fait de ce lancement à la fois un véritable défi et un important succès.